Il est récemment paru dans le Nouvel Observateur un article consacré aux "bonnes recettes" du système scolaire finlandais. On en a l'habitude, j'ai moi-même ici-même plusieurs fois vanté certains aspects de l'école en Finlande, dont j'apprécie en particulier la forte autonomie des établissements.
Cet article court vante certains aspects louables et indiscutables, comme la prise en charge immédiate -et souvent au sein de la classe- de la difficulté scolaire, la formation poussée des professeurs, ou l'équité de traitement en fonction de la population concernée avec des moyens supplémentaires octroyés aux établissements qui en ont besoin. Tout cet ensemble de mesures de bon sens amène depuis dix ans la Finlande en tête dans le classement des systèmes scolaires les plus performants des pays industrialisés. Classement dans lequel la France de son côté fait piètre figure.
Bien sûr, il est difficile de totalement comparer les résultats d'une nation à la population faible et relativement homogène avec ceux d'un pays comme le nôtre. Quoique... Les moyens financiers de l'école en Finlande, s'il sont certes plus importants que ceux que le France lui accorde, restent proportionnellement équivalents. Alors d'où vient la réussite?
D'abord d'une remise en cause violente il y a vingt ans, qui a amené les gouvernements successifs à mettre en place une véritable révolution du système éducatif, impensable chez nous. Ensuite d'une stabilité des décisions prises au cours du temps, qui allaient toutes dans le même sens consensuel pour la rénovation de l'école, impensable également en France quand chaque gouvernement roucoule de ses certitudes et de ses convictions surannées "de gauche" -pfff!- ou "de droite" -pfiouu!- , et où aucun gouvernement depuis trente ans n'a réellement voulu réformer notre système scolaire obsolète hérité du XIXème siècle, et qui a si peu évolué qu'on peut retrouver dans les écrits de Marcel Pagnol et les descriptions de la façon dont son propre père organisait son enseignement un portrait assez fidèle de ce qui se passe aujourd'hui, toutes proportions gardées. Il parait d'ailleurs que c'est une fierté, on nous la ressort régulièrement, on nous bassine oui, avec les "hussards de la République" que j'emmerde et conchie avec conscience car leur temps est passé depuis belle lurette. Oserai-je rappeler aux thuriféraires de la troisième république que nous sommes en 2013? Syndicalistes imbéciles et journalistes merdeux qui nous tartinez quotidiennement votre suffisance, votre inculture et votre incompétence, allez donc vous faire satisfaire d'une quelconque façon, vous vous ferez plaisir et vous nous lâcherez un peu.
Bref, notre système scolaire est sclérosé, nous le savons, nous ne faisons rien pour y remédier. Ou si peu. La volonté de notre présent ministre de l’Éducation nationale, si elle me semble indiscutable, est si peu ambitieuse qu'elle n'est finalement que l'équivalent logique, dans un contexte politique tel que le nôtre, d'un cautère sur une jambe de bois. Mais nos élus sont à notre image: manque de compétence, manque de courage, manque d'ambition, manque de vision. Et je parle bien que notre classe politique dans son ensemble, gauche, droite et centre confondus dans le néant des idées et la négation de la réalité. La Nation des lumières est tombée bien bas.
L'article du Nouvel Observateur se termine par une évidence, qui de plus serait dans notre système la première mesure à prendre pour un politique conscient -au sens premier du terme-; je cite:
La responsabilité
"Le contrôle n’est pas le meilleur moyen d’imposer une politique, martèle Pasi Sahlberg. Mieux vaut faire confiance". Depuis la réforme en Finlande, les directeurs d’école et les professeurs ne sont plus inspectés par l’administration centrale, dont les effectifs ont fondu. Ils sont les décideurs dans leurs établissements. Et se sentent responsables de leurs résultats.
En France ? Qu'attend-on pour en faire autant?
Effectivement, qu'attend-on? J'ai largement évoqué sur ce blog la phénoménale pyramide du système éducatif français dont la compétence est inversement proportionnelle à sa hauteur et à son étendue. Rappelez-vous, je ne le dirai jamais assez, qu'il faut dans cette gabegie institutionnelle qu'est l’Éducation nationale un fonctionnaire dans un bureau pour en gérer quatre sur le terrain! C'est effarant. D'autant, je le rappelle également, que la majeure partie de ces fonctionnaires incompétents et grassement payés -alors que les enseignants français sont parmi les plus mal rémunérés, et de loin, de l'OCDE- passent leur temps à inventer les idioties les plus abracadabrantes pour emmerder les agents de terrain et justifier leur existence. C'est la loi de Murphy poussée à son paroxysme.
Dans cette particularité courtelinesque du système éducatif français, il est un second point que montre pleinement cette fin de l'article du Nouvel Observateur et la comparaison avec le système scolaire performant qu'est celui de la Finlande, c'est celui de l'autonomie des écoles. Qu'attend-on effectivement aussi pour donner aux directeurs d'école français la libre gestion de leur établissement? Même si déjà, comme directeur, je me sens redevable envers les familles et l’État de la qualité de l'enseignement dispensé dans mon école, même si je me sens déjà redevable envers la commune de l'utilisation des locaux ou des subsides qu'elle me dispense, je n'ai pour autant aucune latitude ni maîtrise ni temps pour pleinement exercer la mission qui m'est dévolue par la Nation au service des élèves de mon école. Car je n'ai aucun statut, aucune reconnaissance institutionnelle ni juridique qui me permettrait de pleinement subvenir aux besoins des élèves de mon établissement. Combien de fois ai-je eu à déplorer ces lacunes cruelles qui limitent mes possibilités d'intervention? Je ne les compte pas, ces forfaits compliqués. Je ne suis QUE directeur d'école, se plaisent à me rappeler certains syndicats gauchisants partisans du statu quo total et littéral, comme d'ailleurs elle-même mon institution infantilisante. Hélas. La direction d'école mériterait mieux. L'image forte qu'elle porte auprès de la population serait certainement fertilisée avec les moyens nouveaux apportés par un statut clair. Mais que puis-je attendre des négociations prochaines avec les syndicats prétendument représentatifs? Pas grand chose, je le crains, en dépit des efforts constants et laborieux du GDiD, qui reste la seule et unique association représentative de la direction d'école en France. Qu'est-ce que ce serait sans le GDiD! Je n'ose pas y penser. Le plus drôle, c'est que le premier argument pour ne pas reconnaître les directeurs d'école institutionnellement est l'argument budgétaire, alors que l'argent serait facile à trouver si on faisait les coupes franches, indispensables au bon fonctionnement de ce ministère, que j'ai suggérées plus haut dans ce billet quand j'ai évoqué la monstrueuse pyramide du système éducatif français. Il suffirait d'une décision, je ne parle même pas d'une vision. Peut-être demande-t-elle du courage? Moi j'appelle cela du réalisme au service du bien public. Mais encore faudrait-il que nos élus soient vraiment au service de la Nation...
Oui, qu'attend-on?
De ce que je connais des instits/prod des écoles non directeurs, je ne suis pas certain qu'ils accepteraient un supérieur hiérarchique dans leur école. Pourquoi ne militez-vous pas plutôt pour un directeur élu par ses pairs pour une durée limitée (2 mandats consécutifs de 3,4 ans par exemple) et avec de vrais pouvoir. Je pense que ce serait bien plus accepté.
RépondreSupprimerUn directeur élu? Excusez-moi, mais c'est n'importe quoi de faire fi de cette façon des compétences nécessaires à cette mission.
RépondreSupprimerPourquoi ces élus ne seraient pas compétents ? On peut quand même penser que les collègues ne choisiraient pas le/la plus incompétent/e d'entre eux/elle pour cette charge.
RépondreSupprimerJe n'y crois pas une seconde! Le plus lénifiant, le plus arrangeant, certainement. Le plus séducteur aussi. Mais le plus compétent? Et qui serait candidat? Non, c'est une mauvaise idée qui desservirait largement plus une fonction que je respecte qu'elle ne la servirait.
RépondreSupprimerMoi je dis ça pour vous. Je pense qu'il faut une vraie reconnaissance du rôle directeur mais je ne pense pas que ce serait accepté tel quel par vos collègues et les syndicats. Je ne connais pas bien le système de la Finlande, d'où vient le directeur ? Les établissements sont autonomes et le ministère leur donnerait un directeur ? Il est bien possible qu'il soit élu. Dans un système que je connais, qui n'aime pas trop les hiérarchies non plus, l'enseignement supérieur français, les chefs, doyens, directeurs, présidents sont élus directement ou indirectement par les personnels suivant la taille de l'organisation. Les élus sont également des personnels. Ils sont responsables pour un temps, retour au service normal ensuite ce qui n'exclu pas de pouvoir revenir aux responsabilités plus tard dans la carrière.
RépondreSupprimerLa taille des établissements dans le supérieur n'a aucune mesure avec celle des écoles. De plus, il s'agit d'un conseil d'administration, pas d'un personnel unique omni-responsable comme l'est le directeur d'école. En Finlande, le directeur d'école est embauché par la commune, et recrute à son tour son personnel, ce qui n'est pas transposable en France.
RépondreSupprimerJ'ajoute ce lien si l'école finlandaise vous intéresse: http://www.mlfmonde.org/IMG/pdf/47_77_ams62.pdf
RépondreSupprimerDans le sup, il y a des élus à tous les niveaux, y compris pour les départements qui n'ont que quelques enseignants (parfois 3-4). Et l'université elle-même est dirigée par le président pas par le CA. Pas très clair le mode de désignation du directeur dans votre lien mais je n'ai pas trouvé mieux ailleurs.
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