dimanche 27 octobre 2013

A fond dans la connerie...


Je me posais la question dans mon précédent billet de la position louvoyante -que dis-je, ondulante!- du SGEN-CFDT dans la reconnaissance institutionnelle de la direction d'école. Je précisais qu'à mon sens ce syndicat s'enfonçait dans le néant: absence de pensée construite, refus de l'évidence, incapacité flagrante à se positionner clairement, retournements de vestes réguliers, danse du ventre... On en a enfermé avec une camisole pour moins que ça!

Je viens d'avoir une confirmation stupéfiante de ce que je subodorais avec un article du SGEN-CFDT parisien, qui surfe avec plus ou moins de bonheur sur la question des rythmes scolaires -la planche a dû être savonnée-.

La CFDT y réclame, et je vais citer la chose pour ne pas être taxé de partialité ou d' "interprétationnisme" (oui, le néologisme est moche, mais il est clair), la mesure suivante:

Le Sgen-CFDT demande au rectorat une véritable réflexion pour faciliter les rapports entre Directeurs d’école et Responsables périscolaires par une reconnaissance de leur fonction à travers une présence au Conseil d’école et une participation au conseil de Maîtres. Ces partenaires éducatifs sont des alliés si nous n’en faisons pas des concurrents par calcul corporatiste.

C'est pas du beau, ça? C'est pas du lourd? Que du bonheur, je vous dis! Au lieu de demander à ce que les directeurs d'école rendus statutaires deviennent dans le cadre de missions clairement redéfinies des interlocuteurs privilégiés des municipalités, la CFDT préfère l'inverse, soit faire entrer les responsables du périscolaires dans les Conseils d'école, et même dans les Conseils des maîtres!

Qu'un syndicat, et surtout la CFDT, puisse envisager de faciliter ainsi la municipalisation des écoles en donnant un droit de regard sur les temps scolaires aux responsables du périscolaire me stupéfie. D'autant, faut-il le rappeler, que par essence le Conseil d'école comprend déjà dans ses membres de droit un représentant de la municipalité.

Le SGEN-CFDT, exsangue dans sa représentativité depuis quelques années, n'ayant rien à dire, et se révélant de surcroit dans la totale incapacité de simplement avoir une réflexion intellectuelle quelconque, se lance donc dans la surenchère pour flatter des agents territoriaux que manifestement elle cherche à se mettre dans la poche en leur imaginant un pouvoir sur le temps scolaire. Il parait que le SGEN-CFDT se prétend un syndicat d'enseignants, et ferait partie des farouches défenseurs de l'école publique... Eeeeeh bé, qu'est-ce que ce serait autrement!

Nous voilà donc de plus en plus enfoncés dans la connerie à mesure que se précisent les négociations sur le statut des enseignants et celui des directeurs d'école, et que nous nous rapprochons des élections professionnelles. Je m'attends à en lire encore de bien pires dans les semaines qui viennent. Je vous le dis, chers collègues, les dirlos ont intérêt à se réveiller, et à se battre, s'ils ne veulent pas se retrouver les dindons de la farce sanglante qui se joue actuellement avec leurs tripes.

Et le SGEN-CFDT? Requiescat in pace...

dimanche 20 octobre 2013

Dirlos, ne vous faites pas avoir !


Tout ce petit monde qui trépigne actuellement sur la thématique des rythmes scolaires ne vise, chers collègues directrices et directeurs d'école, qu'à vous entuber -pour rester poli-.

Les élections professionnelles ont lieu en 2014. Les centrales syndicales cherchent donc à se placer d'ici là du mieux possible pour gagner le maximum de sièges dans les diverses instances locales ou nationales et conserver leurs sinécures dorées et reposantes. Et chacune de montrer ses petits bras et ses petits poings pour faire le plus de vent possible et prouver sa détermination au service des enseignants. Comme tous ces rigolos n'ont pour la plupart aucune idée sur ce qu'il convient de construire, comme tous ces rigolos ne savent par essence que beugler en brandissant banderoles et slogans éculés, tout est bon à prendre pour faire oublier son incompétence. D'où cette ruée hilarante sur le moindre bidule qui traîne. Les nouveaux rythmes scolaires passaient par là, les syndicats se sont précipités dessus comme des morts-de-faim.

L’État a programmé pour la fin de cette année et le début de 2014 un certain nombre de négociations sur le statut des fonctionnaires -et des enseignants en particulier- comme sur la façon dont les directeurs d'école doivent être considérés.Sur ces sujets les syndicats n'ont rien à dire, de toute façon ils n'ont aucune idée propre, c'est l'essence même du syndicalisme français qui adore le statu quo même et surtout s'il est absurde, car il lui permet de prospérer sur ce terreau fertile du mécontentement des masses laborieuses qui adorent se laisser tondre par ceux-là mêmes qui sont sensés les défendre.

Cette prétendue "lutte" contre les nouveaux rythmes scolaires qui vous est servie par des syndicats en mal de représentativité et des médias en mal de copie quotidienne n'est qu'un lamentable paravent pour occulter les vraies questions qui sont actuellement discrètement traitées dans votre dos. Vous voulez un exemple? Celui de la récente réforme des retraites, sur laquelle on ne peut pas dire que se soient étendus les syndicats, en est un excellent. Je suis sûr que vous ne savez pas le dixième de ce qui s'est décidé malgré vous, alors que vous avanciez fièrement pancarte à la main en dénonçant les cafouillages du périscolaire... D'ailleurs, de quoi vous mêlez-vous? Cela vous regarde, le périscolaire? Que je sache, ces activités facultatives concernent au premier chef les familles et les municipalités, non?

Pour mémoire, et pour rigoler, je vais évoquer l'extraordinaire argument de la fatigue des élèves: il est de notoriété publique que la rentrée a été de tous temps une période particulièrement reposante pour nos enfants... Je me marre.

Donc, pendant qu'avec bravoure vous discutez en réunion de cellule des imaginaires méfaits de la réforme des rythmes, vos syndicats préférés sont en train de vous tailler un costard sur mesure. Vous pourrez toujours gémir de votre bêtise quand le costume vous aura été livré, et que vous réaliserez à quel point il vous gêne aux entournures.

Je parle particulièrement pour les directeurs d'école. Concrètement, en dehors du GDiD qui est seulement une association de professionnels, qui veut sortir la direction d'école de la gadoue dans laquelle elle s'enlise depuis deux décennies? Le SE-Unsa, la CFTC. Pour ce qui concerne le SGEN-Cfdt, on ne sait pas, il balance, hésite, tergiverse, ne se prononce pas, s'enfonce dans le néant... Nos adversaires sont eux clairement identifiés: le SNUipp (rejeton illégitime de la stalinienne FSU), FO, SUD et la CGT veulent laisser les directeurs s'enliser, c'est leur intérêt propre et égoïste de nous laisser crever en même temps que l'école de la République. Tiens, comme c'est curieux: qui porte le drapeau du "combat" contre les rythmes scolaires? N'y voyez surtout pas un hasard.


Allégorie: les directeurs d'école se laissent entraver par les syndicats d'extrême-gauche.

Chers collègues directrices et directeurs d'école, ne vous faites pas avoir! Depuis plusieurs semaines les syndicats discutent de votre sort dans votre dos! Croyez-vous vraiment qu'ils veulent tous votre confort professionnel? Croyez-vous vraiment que la reconnaissance institutionnelle que nous attendons tous sortira de leur chapeau élimé? Le GDiD est lui aussi consulté, mais ne pourra pas faire partie des négociateurs. Alors au lieu de vous disperser dans de pseudo-luttes stériles car vouées à l'échec, concentrez-vous sur l'essentiel, soit le fonctionnement interne de l'école et la nécessaire différenciation des directeurs d'école. Prenez de la hauteur, bordel!

 Allégorie: un directeur d'école regardant de haut l'agitation syndicale.

Oubliez cette "lutte" qui n'est en pas une et qui ne sert que de diversion, soutenez comme moi l'action du GDiD et de son bureau dans son travail -bénévole je le rappelle, sans décharge aucune ni aide particulière de l’État, ce ne sont que nos cotisations qui font tourner la machine-. Soutenez les revendications logiques que sont notre indispensable reconnaissance juridique, institutionnelle, salariale, notre différenciation au sein de l'institution scolaire, la prise en compte de notre compétence, de notre professionnalisme, de notre fidélité aux textes qui régissent l'école publique française. Les directeurs d'école sont indispensables au bon fonctionnement de l'école comme à sa nécessaire évolution, il faut que ce soit dit et reconnu. D'après les quelques informations que j'ai pu glaner sur les forums publics du GDiD, il semble que cette reconnaissance avance, mais le GDiD qui n'est que consulté veut rester discret par respect envers ses interlocuteurs. Le statut? Peut-être pas tout de suite. Mais que les choses soient dites clairement et notre rôle mis en avant serait déjà une belle avancée, car nous venons de loin, de très loin... et nous ne serions pas là sans le GDiD, c'est clair. Alors ne laissez pas passer cette chance, ne la laissez pas gâcher par des revendications absurdes et d'arrière-garde, ne vous laissez pas distraire ni ne détournez votre attention, car une chance nous est offerte, là , maintenant, aujourd'hui, et elle ne se représentera peut-être pas de sitôt. Et comme moi soutenez le GDiD en adhérant, ça ne coûte pas cher et plus nous serons nombreux plus loin portera notre voix.

samedi 19 octobre 2013

Direction d'école: l'heure du choix...


Les vacances de Toussaint débutent aujourd'hui. La rentrée est faite. Quand j'écris cela, directrices et directeurs d'école savent bien ce que ça signifie: base-élèves est à jour, les APC sont organisées, les élections des représentants des parents sont terminées, beaucoup d'entre nous ont fait leur premier Conseil d'école... Il nous reste pour novembre nos prévisions d'effectifs, mais le plus difficile est passé. Comme chaque année nous avons rempli notre mission sans compter notre temps ni notre énergie. Pourquoi? Simplement parce que nous sommes des femmes et des hommes de terrain, et que nous savons que c'est notre plus grand intérêt de voir "tourner" correctement nos écoles. Alors nous continuons à le faire, avec dignité et abnégation, dans de grandissantes difficultés, mais avec conscience. Combien de temps pourrons-nous continuer ainsi? Notre métier est difficile, notre charge alourdie un peu plus chaque année. Nombreux sont ceux d'entre nous qui malheureusement craquent, que ce soit de fatigue ou à la suite d'une agression, que celle-ci vienne de l'extérieur -famille, municipalité...- ou de l'intérieur même de notre institution. Nous sommes tout à la fois respectés ou craints par certains, appréciés voire aimés, méprisés par d'autres, conspués parfois, ignorés souvent. Mais nous sommes le passage obligé du bon fonctionnement de l'école.

Depuis plusieurs semaines le GDiD discute avec le ministère. Des propositions sont faites de part et d'autre, des idées sont avancées, d'autres abandonnées. Nous savons que les circonstances, budgétaires entre autres, ne permettront pas immédiatement ce pour quoi nous militons activement depuis plus d'une décennie, soit l'obtention d'un statut pour la direction d'école. D'autant que de nombreuses réticences existent, nous ne pouvons le nier, et que ce sont les syndicats qui légalement peuvent et doivent négocier avec le gouvernement. Soit. Nous, directeurs des écoles publiques, n'abandonnerons pas cette revendication. Mais nous devons aussi être pragmatiques. Un pas est fait dans notre direction, nous ne devons pas entraver la marche.

Car nous pouvons nous attendre à ce que l'importance de notre rôle soit reconnue. De nombreux signes en attestent: l'intérêt des centrales syndicales pour notre mission, intérêt soudain pour certaines, certainement intéressé pour la plupart; la volonté du ministère d'avancer sur cette question, qui est régulièrement levée depuis deux décennies par divers rapports, commissions, questions de députés ou sénateurs; les échos médiatiques réguliers qui sont faits de notre charge; l'existence même du GDiD qui milite et fait du lobbying depuis des années à notre sujet.

Après cette période de discussions va débuter celle des négociations. Le GDiD n'en sera pas, il n'est pas statutairement propre à le faire. Ce qui ne lui interdit pas de peser dessus. Certains syndicats avec lesquels le GDiD a de bons rapports peuvent être de bons relais de nos besoins et de notre volonté.

C'est donc l'heure du choix. Que peut-on accepter? Que devons-nous contrer? Déjà il est clair que nous ne saurions opposer un refus systématique de toute proposition qui pourrait améliorer notre sort sous prétexte que nous voudrions un statut et uniquement un statut. Le "tout ou rien", volontiers pratiqué par certaines centrales syndicales, ne peut nous convenir. En revanche, il est évident que certaines idées exposées plus ou moins clairement ces dernières années ne sauraient nous satisfaire, qu'il s'agisse du statu quo ou d'un vague vade-mecum de nos devoirs et responsabilités, comme d'une plus ou moins franche mise sous la coupe des principaux de collège... Directeurs d'école nous sommes, directeurs d'école nous voulons rester! Nous aimons notre mission, nous la connaissons par cœur, personne d'autre que nous pourrait mieux la remplir au plus grand bénéfice de nos élèves. Car le nœud gordien de l'affaire est bien là: c'est la réussite scolaire des enfants de nos écoles qui est en jeu. Direction d'école? La belle affaire! C'est de l'avenir de ce pays qu'il est question. Car un ministre qui veut "refonder l'école" doit bien comprendre qu'il ne peut mener son projet à bien sans nous. L'heure du choix, c'est aussi celle du ministère de l’Éducation nationale.

La considération qui nous est portée va donc certainement changer. Jusqu'à quel point? Il faudra attendre encore quelques semaines pour le savoir, en espérant que M. Peillon ne tarde pas trop après les négociations à dévoiler ce qui en aura été tiré. A trop attendre on exacerbe inutilement les crispations. Trop de directrices et directeurs compétents quittent leur charge chaque année dégoûtés et aigris. Aurons-nous enfin une reconnaissance institutionnelle? Ou ne s'agira-t-il que de vaguement améliorer ce que nous connaissons déjà -indemnité, temps de décharge...-? Il ne faudrait pas que le ministère et les syndicats s'arrêtent à cette dernière possibilité, qui ne contenterait aucun d'entre nous, et surtout ne résoudrait rien. Comment les directeurs d'école pourraient-ils alors accompagner correctement le changement des rythmes scolaires et les autres nouvelles charges qui sont les nôtres dans la "refondation"? Nous devrions en être les piliers, si on nous fragilise un peu plus l'édifice tout entier qui s'effrite déjà finira par s'effondrer. Je ne suis malheureusement pas certain que le ministère en ait conscience.

Nous devrons donc peser sur les négociations, même alors que le GDiD n'en sera pas partie. L'arme ultime d'une grève des directeurs d'école, quelle que soit la forme qu'elle pourrait prendre, ne peut être exclue. Mais pour l'instant c'est auprès des syndicats et du ministère que doit peser un GDiD puissant du nombre de ses membres, de son audience, de son intelligence, de sa fidélité à l'institution. Certes nous aimerions voir celle-ci évoluer, mais c'est en respectant ses structures que nous pouvons la changer. C'est de l'intérieur que nous devons convaincre, et montrer que si les directeurs d'école n'ont pas les mêmes idées politiques ou les mêmes engagements syndicaux, nous avons tous la volonté de faire progresser l'école et de faire grandir nos élèves, et la conviction que nous sommes les mieux placés pour y réussir.

mercredi 16 octobre 2013

Et les directeurs d'école, dans tout ça?


Avec l'arrivée dans quelques 20% des écoles des nouveaux rythmes scolaires, on parle beaucoup du primaire dans les médias. De leur côté, les syndicats s'excitent, surtout dans la région parisienne. Tout ce joli monde piaille, râle, tape du pied. Nous avons droit à une profusion de témoignages -ou de prétendus tels-, de sondages biaisés, de récriminations diverses ou de louanges. Bref, voilà qui est très français.

Et les directeurs d'école, dans tout ça?

Notre situation a été effleurée par ci par là, mais avec parcimonie, et prudence. Si les syndicats admettent que notre barque est plus chargée qu'avant, ils le disent peu, ne le soulignent pas -à part la CFTC et le SE-Unsa si je suis honnête-, pour ne pas ajouter de billes dans l'escarcelle du ministère. Effectivement, des discussion préliminaires aux négociations à notre sujet ont lieu en ce moment, et les syndicats d'extrême-gauche comme ceux affiliés à la FSU ne voudraient surtout pas qu'on prenne prétexte de cette mission alourdie pour améliorer notre sort. Dans le genre le plus bel exemple est celui du SNUipp qui propose que le ministère élabore un vade-mecum de nos responsabilités... C'est tout? C'est tout. Et c'est fort de café.

Concrètement, qu'est-ce qui a changé pour nous en cette nouvelle année scolaire dont nous bouclons tant bien que mal la rentrée? En bien, rien. En mal, beaucoup. Nos devoirs et responsabilités sont strictement identiques, nos charges de rentrée n'ont pas évolué dans leurs injonctions et paperasses idiotes à remplir, nous sommes toujours aussi mal payés -j'y reviendrai-, nous sommes toujours aussi mal considérés par notre hiérarchie -regardez l'affaire Jacques Risso-, et nous n'avons toujours aucune existence institutionnelle ou juridique. En revanche, nous devons désormais en plus assurer des Activités Pédagogiques Complémentaires que nous avons aussi à organiser et à surveiller. Quant à la répartition de nos élèves entre TAP et APC après nos cours, c'est une jolie course à la liste incomplète, aux coups de téléphone imprévus, aux enfants qui partent alors qu'ils devraient rester et l'inverse, à ceux qu'on oublie de venir récupérer... Passe encore en élémentaire dont les élèves peuvent quitter l'école seuls, mais en maternelle que de temps et d'énergie dépensés bêtement! Et question confort affectif pour des enfants si jeunes, chapeau! Notez juste au passage que les APC se font aujourd'hui dans toutes les écoles de France. Merci pour les 48000 directeurs d'école de ce pays.

Pour ce qui concerne nos émoluments, j'aimerais rappeler pour mémoire la profonde compétence des services de l’État, qui ne respectent pas les lois de la République. Effectivement, j'ai reçu il y a quelques jours mes bulletins de salaire des mois de... juin, juillet, août et septembre. Oui, j'ai reçu ça mi-octobre, alors que nous devrions normalement les avoir chaque mois avant le dernier jour échu. J'aimerais également signaler à mes collègues qui ne s'en sont pas rendus compte que leurs indemnités de direction ne leur ont pas été versées fin septembre, car manifestement l’État est incapable de savoir qui est directeur d'école à la rentrée, même si vous l'êtes depuis quinze ans et dans le même lieu. Passons. Même si le blocage du point d'indice de la fonction publique depuis plusieurs années commence à faire sérieusement mal au portefeuille. Comprenez-le, chers collègues directrices et directeurs d'école, bien que fonctionnaires de catégorie A, nous ne sommes que des sous-fifres parmi les plus mal payés de toute l'OCDE. Soyons fiers d'être directeurs, c'est tout ce qui nous reste.

Si les syndicats font feu de tout bois sur les rythmes, ce n'est pas par hasard. Il leur faut faire oublier aux enseignants du primaire les négociations sur le statut des enseignants et celui des directeurs d'école. FO, SUD et la CGT veulent dans leur grande bonté d'âme que surtout rien ne change pour conserver vaguement quelque cohérence dans leur nihilisme; le SNUipp totalement inféodé à la FSU se laisse croquer par le SNES qui veut bouffer l'école primaire, et désire donc à son tour que surtout rien ne bouge. C'est à qui sortira les slogans les plus éculés ou les plus obscurs -pourvu que ça rime-. Joli ensemble et jolie cohésion pour faire oublier le désastre de la direction d'école en 2013. Au point d'ailleurs que je crains fort que M. Peillon, dégoûté, ne quitte prochainement le gouvernement pour se réfugier dans un mandat de député européen. Cela serait certainement une victoire pour les syndicats précités, cela serait une catastrophe pour les directeurs d'école. Car qui oserait récupérer le flambeau? Il est fort à craindre que dans un tel cas l’Éducation nationale échouerait à un quelconque personnage falot qui veillerait à ne pas faire de vague, du style Jack Lang dont nous nous sommes tout de même déjà tapés deux fois un ministériat amorphe.

Donc, chers collègues, réfléchissez bien à ce que vous voulez vraiment. Le propos de ce blog est d'attiser en permanence le feu du statut nécessaire de la direction d'école primaire publique en France. Nous voulons tous être reconnus institutionnellement, juridiquement, financièrement. Nous voulons gérer nous mêmes tout ce qui nous échoit, de la gestion des 108 heures au sein de l'école à la complète organisation interne de notre "établissement" qui n'en est pas un. Nous ne voulons plus être les otages de qui que ce soit, pris constamment entre deux ou trois feux -familles, municipalité, hiérarchie...-. Bref, nous voulons que la mission de direction d'école soit reconnue statutairement. Aujourd'hui l’Éducation nationale ne peut plus en faire l'économie, l'IGEN elle-même dans un récent rapport souligne le blocage du système qui y est lié:

"le rôle de cha­cun (rec­teur, DASEN, chef d'établissement, corps d'inspection, direc­teur, etc) n'est pas clai­re­ment défini".

"... les écoles privées [...] parviennent, semble-t-il, à une plus grande cohérence des équipes pédagogiques. On peut sans doute voir là l’effet de la différence de statut entre les directeurs."

Notons que le SNES a farouchement réagi à une autre suggestion de ce rapport visant à rapprocher ou uniformiser les statuts des enseignants du primaire et du collège. Le SNES considère que les instits sont de la merde, je les remercie de nous le rappeler aussi chaleureusement.

Le GDiD est parait-il aujourd'hui encore au ministère à discuter le bout de gras avec le cabinet de M. Peillon. Espérons qu'il en sortira quelque chose, et que les membres du bureau qui sur leur temps libre se décarcassent pour nous tous ne se retrouvent pas la queue basse. Nous savons que le temps n'est pas au beau fixe. Mais au moins pourrait-on espérer de l’Éducation nationale un début de reconnaissance. Le Ministère, en n'accordant pas au mois de juin dernier aux directeurs d'école la libération de leurs APC, en ne nous donnant pas la totale gestion des 108 heures, ou plus récemment en bloquant la décision rectorale à Tours visant à accorder aux dirlos une petite indemnité complémentaire, a gardé par devers lui quelques biscuits. Il serait peut-être temps qu'il nous ouvre la boîte.

dimanche 13 octobre 2013

Vive la maternelle !


Ainsi donc le CSP, ou Conseil Supérieur des Programmes, est installé dans ses meubles. Ce n'est pas en soi une nouveauté: Lionel Jospin avait créé en 1989 un Conseil National des Programmes qui fut supprimé en 2005 par François Fillon; la "droite" considérait les programmes scolaires comme un enjeu hautement politique et stratégique et préférait remettre la main dessus sans permettre à aucun professionnel de seulement imaginer pouvoir les discuter. On en a vu le résultat déplorable par la suite...

Le premier labeur du CSP consistera normalement à dépouiller les consultations venues de la base, soit des enseignants du primaire, pour élaborer de nouvelles directives qui seront proposées à la critique en juin 2014. La tâche ne sera pas simple. D'autant que la composition du CSP laisse rêveur un praticien de terrain comme moi:

  • six parlementaires;
  • deux représentants du Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) -qu'est-ce qu'ils connaissent de l'école primaire?- dont une est responsable d’ATD-Quart-monde -ah? Bon...- et l'autre un ancien responsable du Comité national olympique et sportif français -je ne vois pas...-;
  • quatre chercheuses et chercheurs, notamment dans les domaines scientifiques -difficile d'échapper à cette engeance qui dit rouge un jour et bleu le lendemain-;
  • deux Inspecteurs généraux, représentants de « l’Institution » -légitimes, certes, mais jusqu'à présent on ne peut pas dire que ces gens-là aient brillé par leur compétence en ce qui concerne l'école primaire-;
  • deux personnalités présentes dans toutes les commissions et conseils depuis vingt-cinq ans;
  • deux personnalités ayant exercé des responsabilités syndicales, l’une au SNESUP à l’IUFM de paris, l’autre au niveau national au SNES...

Vous auriez aimé y voir des instits ou des directeurs d'école? Soyons sérieux, voyons. Ce qui était le plus important était manifestement que cette instance soit sexuellement paritaire et civilement équilibrée, et c'est le cas, pas qu'elle soit compétente. Mais je suis mauvaise langue, et laissons le savant cocktail du CSP commencer son boulot sans être d'emblée négatif. Mais on a le doit d'être dubitatif.

Reconnaissons tout de même que dans sa "lettre de commande" le ministre a laissé la porte ouverte:

Afin de mener ces différentes réflexions, vous aurez toute latitude pour rencontrer les personnes et les organisations susceptibles d’éclairer votre réflexion, les organisations syndicales, les associations de professeurs spécialistes, les inspections générales ou les sociétés savantes, ainsi que des représentants des directions (notamment la direction générale de l’enseignement scolaire et la direction de l’évaluation, de la performance et de la prospective), mais aussi les représentants des usagers du service public de l’éducation ou d’autres administrations ou institutions y concourant, si vous le jugez utile.

Il vous appartient de choisir les membres des groupes d’experts que vous souhaiterez mettre en place. Vous pourrez faire appel à l’expertise de spécialistes (universitaires, chercheurs, inspecteurs généraux, etc.) et associer des acteurs de terrain. Sur ce dernier point, les recteurs d’académie sont à votre disposition pour faciliter la participation d’inspecteurs territoriaux et d’enseignants à ces groupes. Je souhaite que vous veilliez tout particulièrement à la représentation de la diversité des compétences et positions sur les sujets au titre desquels vous mandaterez ces groupes.

Je ne sais pas qui le CSP se donnera la peine d'inviter ou de consulter, mais gageons qu'il y aura pour élaborer les programmes du primaire plus de recteurs et d'inspecteurs généraux que de professeurs des écoles. Et puis, la présence des SNES et SNESUP dans cette instance...

Je me sens bien caustique ce matin. Peut-être la fatigue accumulée depuis un mois et demi me rend-elle cynique. C'est d'autant plus injuste pour le CSP qu'il devra commencer par les programmes de l'école maternelle, qui me concernent au premier chef moi qui suis directeur de ma petite structure semi-rurale bien chargée de ses plus de soixante élèves entre trois et cinq ans pour deux classes. Je vais avoir les oreilles qui sifflent, comme on dit, car qu'est-ce qu'on va causer de moi ces prochaines semaines et prochains mois!  Trois fois dirai-je: une première fois comme directeur d'école dans les discussions et négociations entamées que j'espère voir aboutir à un mieux-être et à une reconnaissance juridique et institutionnelle pour nous autres esclaves du système; une seconde fois comme enseignant de maternelle qui espère voir reconnaître la place particulière et primordiale de son niveau d'enseignement; et même une troisième fois quand j'attends du ministre qu'il réécrive une mouture des nouveaux rythmes de l'école qui prenne en compte les enfants entre trois et six ans dont la fatigabilité et les intérêts n'ont rien à voir avec ceux d'enfants plus vieux.

Les discussions sur la direction d'école sont sur les rails. Nous ne verrons peut-être pas de statut, hélas, mais certainement une reconnaissance de l'importance de notre rôle et une distinction de nos compétences et prérogatives. Ce sera un début.

Les programmes de l'école maternelle devraient nous rendre notre place. Nous restons méprisés encore par nos collègues de l'élémentaire, si j'en crois ce que j'entends et perçois même dans ma commune, et ignorés par les professeurs du secondaire pour lesquels nous sommes un menu fretin sans intérêt ni importance. Il est largement temps que le travail et les résultats de l'école maternelle soient mis en avant, comme il est temps qu'elle soit recadrée tant les excès et abus divers ont proliféré depuis quinze ans. Nous sommes passés d'une école maternelle laxiste mais épanouissante à une école maternelle primarisée à outrance dans ses fonctionnements et outrageusement évaluatrice. Il est certainement possible de trouver un juste équilibre entre apprentissages et épanouissement personnel, en favorisant surtout la confiance en soi et l'autonomie. C'est ce que je tente de faire quotidiennement dans ma classe, que je tiens six heures par jour, avec un certain succès je l'écris sans en être plus faraud pour autant tant je suis persuadé que nombreux sont mes collègues sur la même longueur d'onde. Vive la maternelle! Et puis au passage on pourrait changer ce nom d'école "maternelle" -maternante?- pour celui de "Première école", car c'est bien de cela qu'il s'agit pour nos élèves et c'est bien ainsi qu'ils la ressentent.

La réécriture des nouveaux rythmes scolaires sera une nécessité. Les difficultés qui sont apparues dans leur application récente, pour les communes qui les appliquent depuis cette rentrée, viennent quasiment toutes de la maternelle. C'est logique, quand on considère que le législateur n'a absolument pas réalisé qu'on ne pouvait pas appliquer à un enfant de trois, quatre ou cinq ans, le même traitement qu'à un enfant de dix ans. C'est ainsi que depuis septembre on observe un anéantissement des espaces scolaires spécifiques aux élèves ainsi qu'une négation du lien profond à l'adulte (le partage des classes avec le périscolaire et la succession d'intervenants inconnus ou sporadiques sont des catastrophes pour la sécurité affective nécessaire à la construction individuelle d'un jeune enfant), une négation des temps de retour sur soi et des temps de repos, un allongement de la durée des activités collectives -le comble quand on se rappelle que ces "nouveaux rythmes" étaient sensés alléger la journée de classe!-... Pire, les écoles des communes qui travaillent encore quatre jours doivent tout de même organiser des APC (Activités Pédagogiques Complémentaires), histoire d'ajouter une heure de classe à des enfants qui n'en peuvent déjà plus après leurs six heures habituelles. Voilà bien ce qui se passe quand on ne demande pas à un praticien de terrain la réalité d'un fonctionnement. En attendant ce sont nos petits élèves qui payent, et je me demande bien ce qu'attend le ministère pour ajuster le tir le plus rapidement possible. On va continuer à les crucifier toute l'année scolaire? Sans parler des enseignants qui ne touchent plus terre, je peux en parler en connaissance de cause. Quand je pense qu'en plus je dois assurer ma mission de direction d'école... Allo? Il y a un cerveau là-haut?

Allons, je dois rester zen -pas le choix de toute façon-, rassurer mes élèves et les cajoler du mieux que je peux tout en les accompagnant dans leur acquisition de compétences, de connaissances et d'autonomie, et soigner le rhume qui ne me lâche pas depuis un mois. Les élections sont bouclées, une bonne chose bien lourde. Il me reste à organiser mon premier Conseil d'école de l'année scolaire, en me dopant un peu pour ne pas bafouiller de fatigue. Et il me reste aussi à espérer -espérer qu'on va arrêter les âneries irréfléchies, reconnaître ce qui doit être reconnu, réécrire ce qui doit être réécrit, rectifier ce qui doit être rectifié-, sans toutefois me faire trop d'illusion: mes trente-cinq ans de carrière de toute façon me l'interdisent.

samedi 5 octobre 2013

48000 fusibles...


Les directeurs d'école sont secoués dans tous les sens en ce moment. Les capitaines de caboteurs que j'évoquais dans un ancien billet sont singulièrement ballottés sur un océan éducatif aux eaux agitées.

La rentrée est difficile pour toutes les écoles, les enfants fatigués, les conditions climatiques insatisfaisantes. Certains connaissent les affres d'être "passés" au rythme de quatre jours et demi, avec une organisation supplémentaire à assumer. D'autres ont vu leurs effectifs exploser. Et pour parfaire le tableau rien n'a changé des injonctions diverses et autres documents ou chiffres à rendre pour l'avant-veille dernier délai.

Bref, c'est comme d'habitude pour les directeurs d'école la période la plus compliquée de l'année.

Si on parle beaucoup dans les médias actuellement des "nouveaux" rythmes scolaires, c'est le point de vue de certaines familles et de certains élus qu'on y expose, ou les erreurs de communes qui ont voulu anticiper sans prendre le temps d'y réfléchir, ce qui amène bien entendu encadrement dérisoire et activités périscolaires ridicules. C'est logique. Techniquement l'école elle-même est moins impactée que les municipalités, si on excepte trois points que j'ai déjà dénoncés:

1) l'absurdité de prétendus "rythmes" qui ne tiennent aucun compte de l'âge des élèves concernés, comme si un enfant de trois ans et un de dix ans pouvaient être traités ou considérés de la même façon, avec la même fatigabilité et les mêmes intérêts;

2) la non-prise en compte des frais engendrés -de garde, de déplacement- pour des enseignants amenés à venir sur leur lieu de travail un jour de plus par semaine;

3) la gestion technique des listes d'élèves par les directeurs d'école -qui n'ont que ça à faire, chacun le sait-, avec des enfants dont pour beaucoup les journées de classe sont inégales en durée, et qui ne savent plus eux-mêmes où ils en sont chaque fin d'après-midi...

Mais ces trois points pourraient rester anecdotiques, s'ils ne rajoutaient pas une couche supplémentaire à la mission déjà fastidieuse et énergivore des directeurs d'école lors des semaines de rentrée. Dois-je rappeler des élections de parents d'élèves parfois compliquées à organiser? Ou la quantité ahurissante de paperasse que nous sommes amenés à remplir, de courriels, de tableaux Excel et autres bases de données, souvent inutiles ou qui pourraient largement attendre des jours meilleurs? Sans compter l'agitation continue des IEN de circonscription en cette période, une vraie danse de Saint Guy avec son cortège de "notes de service" redondantes et autres consignes superfétatoires. Je ne voudrais pas oublier que le directeur d'école est aussi un enseignant, qu'il a charge de classe et qu'à la rentrée ce n'est pas rien; seuls 5% des directeurs d'école sont totalement déchargés de classe, alors que 17820, soit 38%, n'ont aucune décharge et doivent s'occuper de leurs élèves 6 heures par jour, ce qui évidemment les oblige à gérer leur école en dehors du temps scolaire. Ridicule. Idiot.

On aurait pu imaginer, avec cette "refondation" dont on nous rebat les oreilles depuis deux ans, que certains aspects pénibles de la fonction de direction d'école auraient pu depuis sinon disparaître du moins être fortement atténués. Que nenni, chers collègues! Rien n'a changé, c'est même pire! Concrètement les directeurs d'école n'ont RIEN obtenu depuis deux ans de concret pour alléger leur charge ou reconnaître l'importance de leur mission. Ce n'est pourtant pas faute de causer de nous dans les hautes sphères, depuis même la fameuse "graaaaande concertation" qui a fait tant de bruit pour... ben pour rien en fait. Much Ado About Nothing. Mais je l'avais déjà écrit ici à l'époque, tant il était évident que cette longue discussion était un foutage de gueule intégral. Et pourtant on y a causé des directeurs d'école, chacun dénonçant notre position ahurissante et intenable, sans existence réelle, alors que nous sommes indispensables au fonctionnement de l'école publique française.

Car nous sommes bien, directeurs et directrices d'école, les maillons essentiels du fonctionnement pyramidal de l'institution. Reconnus localement par nos élèves, les familles, les municipalités, c'est nous qui gérons tous les aspects pratiques qui permettent à l'école son activité quotidienne centrée sur les apprentissages aux élèves. Mais étrangement nous sommes ignorés ou méprisés par notre hiérarchie, même immédiate, qui ne voit en nous au mieux que des factotums médiocres et corvéables à merci, au pire que des fusibles fort pratiques à faire disjoncter quand le besoin s'en fait sentir.

J'ai déjà expliqué dans un précédent billet que ce rôle étonnant de fusible servait pour l'administration incompétente du ministère de l’Éducation nationale à se protéger de ses propres dysfonctionnements. Au moindre souci qui pourrait distraire les IEN ou les DASEN de leur sieste agitée, on explose le directeur d'école, on lui met tout sur le dos, on le harcèle, et vogue la galère! C'est facile, ça ne coûte rien, cela relève de l'opacité de règles internes étranges qui se perpétuent depuis des décennies, c'est totalement contraire à toute justice, mais c'est efficace. Nous avons ainsi en France, si j'en crois les chiffres 2013 de la DEPP, 47672 fusibles prêts à sauter à la moindre alerte, sans justification ni explication digne de ce nom, sinon que pour l'administration le directeur "a failli" à sa tâche. Comment, pourquoi, tout le monde s'en fout, hiérarchie en tête qui peut ainsi se débarrasser à bon compte de ceux qu'elle a dans le nez ou de ceux qui ne rentrent pas parfaitement dans le moule, quelle que soit leur réussite éventuelle sur le terrain. Tous les prétextes seront bons pour écarter un directeur compétent mais qui titille peut-être son administration de tutelle ou en dénonce les abus, qu'il ait ou non raison de le faire. Le mensonge, le déni de justice et le harcèlement comme méthodes de gestion, oui le fonctionnariat de l’Éducation nationale est ainsi, le diplodocus ne veut voir qu'une tête, et surtout éliminer le plus vite possible, sans coup férir ni recours possible, le moindre petit caillou ou vague obstacle à son lourd cheminement vers les marais puants où il finira pourtant fatalement par s'enliser.

L'horrible procès qui est fait actuellement à notre collègue Jacques Risso en est hélas une illustration parfaite, avec un dossier forcément à charge rempli de rumeurs et de pièces qui n'ont rien à y faire, qu'elles relèvent de la sphère privée ou de la liberté d'expression que pourtant la loi reconnait aux fonctionnaires. Ne vous trompez pas, le drame que connait Jacques Risso est emblématique, mais il n'est pas le seul! D'autres directrices et directeurs sont virés comme des malpropres chaque année, soit que comme la mouche du coche ils aient agacé le conducteur, soit qu'ils aient fait une erreur pour laquelle ils auraient dus être soutenus mais dont l'administration prendra immédiatement prétexte pour écarter l'importun et opportunément éliminer le problème. Le directeur concerné ne pourra rien y faire, il n'est rien, il n'existe pas, il n'a aucun statut qui le protège, comme d'ailleurs il n'a souvent reçu ni formation ni consignes précises qui définissent clairement sa mission. Le directeur devient directeur "sur le tas", en essuyant refus, mépris, coups et avanies. Et sans aide, sauf exception, de sa hiérarchie immédiate.

Je ne vous referai pas le couplet du statut nécessaire des directeurs d'école, si vous lisez ce blog vous le connaissez par cœur. Je pense simplement ici à mes collèges disparus de cette mission, soit qu'ils ont été déplacés, virés, ou plus simplement que d'eux-mêmes ils s'en sont échappés, dégoûtés ou épuisés. Il va bientôt falloir que le Ministre choisisse entre les directeurs d'école, qui sont les seuls à même d'appliquer cette "refondation" qu'il appelle de ses vœux, et son administration pléthorique et incompétente, ou pire. J'attends de voir ce que donneront les divers entretiens que le GDiD a et aura avec le ministère, sans me faire peut-être trop d'illusion. Mais fatalement si rien ne change pour les directeurs d'école, le GDiD qui claquera la porte la refermera en fait ainsi violemment au nez d'une occasion ratée pour rendre tout son lustre et toute son efficacité à l'école publique française. L'école ne pourra plus que crever lamentablement sous la tutelle des principaux de collège. Les syndicats du secondaire, assistés de quelques syndicats du primaire au tempérament suicidaire, attendent impatiemment la mise à mort. La balle est dans votre camp, Monsieur le Ministre.

mercredi 2 octobre 2013

Consultation: squizzez les IEN !


Vous savez tous, chers collègues directeurs d'école, chers collègues enseignants du primaire, que le ministère vous consulte actuellement sur les programmes. Vous devez d'ailleurs consacrer trois heures -sur les cent-huit que vous devez à votre administration- à ce travail. Comme si nous n'avions que ça à faire en cette période d'élections, mais bon...

Vous avez peut-être reçu de votre DASEN ou de votre IEN une grille à remplir. Le problème, c'est que ces braves gens vous demandent de leur retourner le document rempli. Dans quel objectif? Logiquement il s'agirait uniquement de le transférer au ministère. Mais ne vous faites pas d'illusion! Votre IEN se fera un plaisir de lire votre prose.

De là à imaginer que votre IEN peut se servir de ce document comme d'un outil d'évaluation, il n'y a qu'un pas à franchir, assez facilement d'ailleurs. Et même s'il ne cherche pas volontairement à le faire, ce que vous y inscrirez restera à charge ou à décharge en ce qui vous concerne.

Inutile de dire que bien entendu vous ne pourrez guère dans de telles conditions rester aussi critique que vous souhaiteriez l'être. Arriverez-vous à écrire ce que vous avez sur le cœur, sachant que votre IEN fait partie de ceux qui se sont jetés comme des morts-de-faim sur les programmes de 2008 et les directives de Darcos et Chatel? Non, évidemment. D'autant que la période est malsaine dans l’Éducation nationale en ce qui concerne la liberté d'expression, si on en croit ce qui est arrivé à notre collègue Jacques Risso que je continuerai à soutenir contre vents et marées.

Dans sa grande sagesse -pour une fois- le ministère a imaginé la possibilité de lui faire parvenir directement votre prose. Vous n'êtes même pas obligés de la signer. Soyons clairs: vous ne devez rien à votre DASEN ni à votre IEN, vous n'avez pas à leur prouver que vous avez occupé ces trois heures à travailler là-dessus: ces heures vous sont accordées, point barre!

Alors, n'hésitez pas! En ce qui concerne, mes récriminations ont largement dépassé le cadre des programmes! Pour une fois qu'on vous demande votre avis, lâchez-vous: depuis des années voire des décennies tout se fait sur votre dos sans vous demander ce que vous en pensez, alors pour une fois dites ce que vous avez sur le cœur. Comme moi vous en avez gros? Vous ne supportez plus votre hiérarchie immédiate qui vous harcèle bien qu'incompétente et lâche? Dites-le, écrivez un poème, sortez six pages de prose.

Pour ce faire, téléchargez le document de réponse ici: http://eduscol.education.fr/cid73818/consultation-primaire.html puis renvoyez-le, signé ou non cela n'a pas d'importance (mais précisez bien que vous êtes enseignants du primaire), à cette adresse-là:
 consultation.primaire@education.gouv.fr

Et surtout ne vous laissez pas avoir par votre IEN! Vous n'avez rien à lui rendre, ni aucun compte, ne lui rendez rien ni aucun compte. Squizzez votre IEN, cela vous fera un bien fou, et peut-être que ça l'emmerdera un peu: chacun son tour.

Ah, juste un détail, n'hésitez pas à placer à la fin de votre document cette phrase que vient de me refiler un copain, et inspirée par le GDiD

Il est indispensable d’affirmer et réaffirmer la liberté pédagogique des enseignants dans le cadre des programmes et dans leur manière d'évaluer (positivement) les élèves, comme il est indispensable d’enfin « reconnaître » la structure particulière de l'école primaire, maternelle ou élémentaire, dirigée et animée par un directeur au statut clair, précis et fonctionnel, qui seul peut garantir aujourd’hui le plein et total succès de ses élèves dans le cadre rénové de la Refondation tel qu’il est envisagé de nous le donner.