J'ai déjà exprimé l'idée que les regroupements d'écoles seront indispensables à court terme, non pas pour que le ministère de l’Éducation nationale fasse des économies, mais pour apporter à l'école de notre Nation cette impulsion que nous désirons tous et qui lui redonnera l'efficacité qui lui fait actuellement défaut.
Cette efficacité passe à mon sens par une autonomie affirmée des écoles. Continuer à centraliser l'éducation comme c'est le cas actuellement est à l'échelle de notre pays suicidaire. D'autant que le taux de fécondité français augmente notre population à une vitesse que nos voisins nous envient. Une centralisation peut se comprendre dans des "länder" de 1 à 10 millions d'habitants, pas avec 65 millions de français!
Cette autonomie dans les projets et l'organisation pédagogique, qui doit être affirmée et pérennisée, est conditionnée par l'octroi aux directeurs d'école d'un statut juridiquement clair aux missions précises, sans lequel toute velléité de réforme ne peut qu'échouer. Ce que notre ministre et son entourage, ou la DGESCO, n'arrivent hélas pas à comprendre. Je l'ai tellement écrit et réécrit sur ce blog que je ne me donnerai pas la peine de l'expliquer à nouveau.
Ce statut pour les directeurs d'école sera forcément concomitant à un regroupement des écoles, je vais m'en expliquer. Mais il doit être un préalable: le statut d'abord, les regroupements et leurs avantages ensuite.
Pourquoi regrouper? Si donner aux directeurs un statut juridique est une nécessité, il est évident que, même en augmentant la part de PIB investi par la France dans l'éducation, l'Etat ne peut se permettre de donner aux 50 000 directeurs d'école français, qui dirigent des écoles entre 2 et 14 classes ou plus, les mêmes avantages financiers ou les mêmes temps de décharge. Cela serait d'ailleurs absurde pour ce dernier point, car le temps nécessaire à la gestion d'une école diffère totalement si l'on a 2 ou 7 ou 12 classes. J'accorde en revanche que le temps en question est totalement ignoré pour les petites écoles (comme la mienne) dont les directeurs n'ont aucun temps de décharge alors qu'un minimum d'heures leur serait nécessaire. J'accorde aussi qu'en terme de salaire la responsabilité réelle qui incombe aux directeurs est parfaitement dédaignée: être cadre dans les faits et vaguement rémunéré comme nous le sommes est méprisant, il faut le dire.
Regrouper les petites écoles, à condition que ces regroupements soit territorialement logiques, permettrait de résoudre une grande partie de ces problèmes. le tableau qui suit va vous le démontrer. J'ai pris plusieurs situations courantes, dont entre autres celle de la commune dans laquelle j'exerce, qui comprend deux écoles de 2 et 5 classes. J'ai calculé le coût actuel cumulé pour l’État de ces deux directions, dont les deux directeurs aimeraient construire de plus étroits rapports mais qui dans les faits restent cloisonnées en dépit des volontés réelles d'échanges.
Cliquez sur l'image pour l'agrandir.
Je me suis basé sur le traitement médian annuel brut en 2012 d'un professeur des écoles. Ce qui ne m'interdit pas d'espérer une franche valorisation de notre métier, mais pour faire des calculs il faut bien se baser sur quelque chose de concret. Cela reflète donc uniquement la situation présente, mais la reflète fidèlement.
J'ai imaginé ensuite ce qu'il en serait si les deux écoles étaient regroupées en une seule école primaire. Pour le coup, l’État fait de sérieuses économies, ce qui n'est pas l'objectif de la démonstration car le directeur d'école qui subsiste, lui, n'y gagne rien, et surtout pas du temps pour faire correctement son travail. Mais j'ai aussi imaginé que cet unique directeur subsistant voie sa ridicule indemnité disparaître au profit d'un salaire augmenté de 50% (première hypothèse). J'ai enfin imaginé ce que coûterait un directeur revalorisé à hauteur de 50% mais également totalement déchargé de classe (seconde hypothèse).
Dès le premier exemple, les calculs sont parlants pour la seconde hypothèse: le coût pour l’État est le même qu'actuellement dès 7 classes! En revanche, le directeur est cette fois correctement rémunéré, à hauteur de ses responsabilités, et totalement déchargé il peut enfin se consacrer entièrement à sa direction d'école. Est-il utile, chers collègues qui connaissez bien la réalité du terrain, de préciser l'efficacité du travail d'un directeur d'école qui travaillerait dans ces conditions, avec une autonomie affirmée des choix pédagogiques de son "établissement" ?
Au-dessus de 7 classes l'Etat fait des économies, ce qui autorise à imaginer la possibilité d'un secrétariat à 1/4 temps, à 1/2 temps ou à plein temps selon la taille de l'école. Financièrement à budget constant, plus rien ne s'y oppose. Et ce calcul n'est que sommaire, rien n'interdit de voir plus loin.
CQFD. Pour ma part, dans ces conditions, j'aimerais assez devenir directeur de l'unique école primaire de ma commune. Je suis persuadé que les élus en seraient ravis de n'avoir plus qu'un seul interlocuteur juridiquement reconnu et à la mission précisément définie. Je peux également affirmer que l'efficacité de notre enseignement n'aurait plus aucune mesure avec celle de nos écoles actuelles. Alors, Monsieur le Ministre, si vous souhaitez vraiment transformer l'école française, vous savez de quoi il faudra entre autres discuter avec les gens sérieux du GDiD lors des prochains entretiens sur la direction d'école.
"CQFD. Pour ma part, dans ces conditions, j'aimerais assez devenir directeur de l'unique école primaire de ma commune."
RépondreSupprimerCertes... Mais il y aurait donc des directeurs qui restent... et d'autres qui laissent leur place par la force des choses... Avec quels critères ???
Départ volontaire... retraite... que sais-je?
RépondreSupprimer