dimanche 6 avril 2014

Ce qui me meut...


Certaines attaques, certaines réflexions, certaines réactions et autres questions m'amènent à me demander à quoi sert ce blog, ou plutôt ce qu'il est, et pourquoi je l'écris. Je ne m'étais jamais vraiment donné la peine d'y réfléchir, et après deux ans d'existence -ce qui est déjà long sur internet- il est légitime de tirer un premier bilan.

D'abord ce blog a été créé sur un vide. Effectivement, s'il existe de nombreux sites, forums et blogs d'enseignants, la plupart sont orientés "partage" -informations, aide et assistance...-, "humeur" mais généralistes -enseignement en général, secondaire...-, ou "humour" -billets humoristiques, dessins et caricatures...-. J'en ai référencé quelques-uns dans la colonne de droite. Peu de sites sont des sites d'analyse, ou alors institutionnels donc forcément orientés -sites syndicaux, sites gouvernementaux...-, journalistiques donc souvent lapidaires et mal informés ou franchement orientés eux aussi, ou pédagogiques donc peu adaptés à notre système éducatif français en ébullition depuis quelques années. Beaucoup de ces blogs, sites ou forums sont fort respectables et intéressants, j'en consulte beaucoup et souvent, ce qui me procure une base d'informations diversifiée et beaucoup plus complète qu'on peut l'imaginer quand on croise ce qui nous y est donné: chiffres, points de vue, critiques ou louanges... Mais il n'existe que peu de sites d'analyse indépendants consacrés au primaire, et il n'en existe aucun consacré à la direction d'école depuis la disparition de la Bouteille à l'encre. Sauf bien entendu Le Confort Intellectuel.

D'autre part, il me semblait important voire indispensable de lutter contre un certain nombre d'acteurs de l'information ou de l'enseignement en France pour lesquels il est impensable d'apporter une information structurée et argumentée qui ne soit pas partisane ou bidonnée, ou pâle copie ou resucée d'articles lapidaires de l'AFP ou de communiqués de presse, ou encore issue d'une pensée unique et bien-pensante digne des bisounours. Si on veut connaître la réalité de l'enseignement primaire, celle qui est quotidiennement vécue par les 324000 enseignants du premier degré public dont 48000 directeurs d'école, on ne peut pas se contenter de lire la presse syndicale et encore moins les médias nationaux. Il est nécessaire de creuser la mine d'informations disponibles, de croiser les données, d'exploiter les chiffres... et d'écrire la vérité. Cela, je sais le faire, parce que je l'ai toujours fait même lorsque je ne "bloguais" pas. L'écrire n'en est que le prolongement logique. Et il est si facile de dénicher des informations parfois sensées rester confidentielles... Faites attention à ce que vous écrivez sur le net, en quelque lieu que ce soit!

Bien sûr l'information que je donne est forcément parcellaire. Je ne suis pas un journaliste généraliste dont le fond de commerce serait l'enseignement. Encore une fois je me contente de parler de l'enseignement primaire, mais au travers du prisme d'une expérience longue de trente-cinq années -et seize ministres parmi lesquels deux Lang- dont treize de direction d'école. Autant dire que je suis revenu de beaucoup de choses! Je pourrais dresser un catalogue digne de Mozart et da Ponte des promesses non tenues, des affirmations et revendications syndicales honteuses, des grèves enseignantes absurdes et inopérantes, des réformes avortées, des mensonges des uns et des autres...

Avant d'écrire ce blog et de recevoir par courriel insultes et commisération de la part de ceux que je gêne, j'ai connu nombre de déboires similaires. Ma liberté d'esprit et mon franc-parler ne m'ont que rarement été utiles au cours de ma carrière, bien au contraire. J'ai souvent été mis au banc, déprécié, décrié, par mon administration de tutelle comme par mes pairs. J'ai aussi été apprécié -beaucoup- par ceux avec lesquels je travaillais ou ceux qui faisaient l'effort de me connaître, comme par mes élèves et leurs familles dont certains sont encore en contact avec moi après vingt ans ou plus parce qu'ils savaient la réalité, la quantité et la valeur de ce que je pouvais apporter, le temps que je pouvais y passer, l'investissement que j'y faisais. J'ai toujours assumé mes positions, comme j'ai toujours également su reconnaître mes limites et mes erreurs, et m'excuser lorsque cela était nécessaire. Je reste humain, donc faillible. Mais jamais je n'ai accepté de me taire, ni accepté de prendre pour argent comptant ce qu'on pouvait vouloir me dire ou m'imposer. Les "appareils", les groupements, les pétitions, les grèves, les défilés, les partis, les syndicats, où tout le monde dit et pense la même chose en même temps quitte à frôler l'absurde ou la mauvaise foi, ce n'est pas pour moi et ne l'a jamais été. On m'a taxé d' "antisyndicalisme primaire", et je le revendique tant je doute de l'honnêteté intrinsèque du syndicalisme enseignant français, qui dépend totalement des fonds publics pour son fonctionnement et n'a que depuis peu et pour quelques rares centrales l'idée que le bien public amène parfois à devoir faire des concessions et à travailler dans une vision à moyen ou long terme qui ménage la société dans son ensemble. Le fond du fonctionnement syndical reste hélas dans ce pays l'égoïsme, le clientélisme et le profit personnel. Je ne dois pas être le seul à le penser quand je constate la désaffection quasi générale pour ces syndicats qui connurent à certaines époques pourtant proches des scores d'adhésion soviétiques! Quand j'étais jeune dans le métier il était impensable de n'être point syndiqué... J'étais bien sûr impensable. Je le réécris, j'observe dans certaines centrales une évolution des comportements digne d'éloges, mais combien il m'est pénible d'assister une fois de plus en cette année d'élections professionnelles à l'agitation et au racolage afférents et habituels.

J'ai évidemment eu beaucoup de difficulté à entrer au GDiD. Ce n'est que parce qu'on a su me convaincre que ma parole n'y serait pas contrainte comme de la foncière honnêteté intellectuelle de ceux qui s'y investissaient depuis des années que j'ai finalement succombé à entrer dans une association autre que culturelle. Pour la première fois de ma vie j'ai accepté de participer à une démarche de lobbying, parce que je crois profondément qu'il n'est pas possible de laisser perdurer ainsi la déplorable situation dans laquelle s'enlisent les directeurs des écoles publiques de mon pays.

Cette démarche de lobbying, j'y participe à ma façon, avec ce site. Soyons clairs, je ne fais pas ce blog pour mon propre confort, et je ne suis pas certain que je profiterai avant ma retraite qui s'approche à grands pas des éventuelles évolutions de la mission de direction d'école. Je me bagarre pour ceux qui sont derrière moi, un peu ou beaucoup plus jeunes, qui se retrouvent coincés dans un labeur intenable, ou vont prendre cette mission dans les années qui viennent. Je ne peux pas admettre qu'en 2014 encore les directeurs d'école n'aient aucune existence juridique et institutionnelle, aucune reconnaissance de la société qui les emploie, n'aient pas les moyens ne les fruits de leur action, malgré leur position centrale et leur importance primordiale dans le fonctionnement de l'école et la réussite des élèves.

J'ai de la chance, écrire ne me pose pas de difficulté particulière. J'ai l'idée générale de mon billet, de ce que je vais y exprimer, un plan rapide... Je pose les premiers mots, et le reste vient tout seul. Je ne suis pas innocent, je sais parfaitement que ma façon d'écrire peut choquer, peut faire rire ou simplement réjouir, parce que j'appelle un chat un chat et que je n'ai pas peur des formules rapides ou des généralisations outrées. Mais cela fait partie de la forme, le signifiant doit être efficace pour que le signifié porte. C'est la limite de ce genre d'exercice. Ne croyez pas que je n'en sois pas conscient, et que parfois je ne me reproche pas certaines formulations. Elles font partie du jeu, car c'est certes un jeu, mais un jeu important bien qu'il puisse être cruel que celui d'informer de la vérité et de contrer l'absence de réflexion ou pire les idées toutes faites.

Je n'espère qu'une chose, et c'est bien pour cela que je tâche à rester anonyme du mieux que je le peux, c'est que je pourrai encore longtemps assurer cette veille sanitaire. Du moins jusqu'à ce que les directeurs d'école soient enfin reconnus à la mesure de leurs compétences et de l'importance de leur mission pour la Nation. Après... je pourrai me reposer, ou même peut-être exercer pendant un an ou deux mon métier que j'aime dans la sérénité enfin obtenue.

4 commentaires:

  1. Tout à fait d'accord avec ce que tu développes dans ce billet. J'ajoute malheureusement que la tentation est grande, de faire taire les propos qui dérangent, et qui ne vont pas dans le sens de ce que telle ou telle "représentation" souhaite. Longtemps le GDiD n'était pas tomber dans ce travers. Mais aujourd'hui... NON aux limites de la liberté d'expression, pas de censure. OUI au débat, aux réponses par l'argumentation en usant d'un ton humble et non péremptoire.

    RépondreSupprimer
  2. Encore faut-il que le contradicteur respecte lui aussi ces règles... Quand quelqu'un y écrit une énormité et refuse la contradiction, je comprends aussi qu'on ne puisse lui laisser la parole. D'autant qu'il ne faut pas oublier que certains débats dépassent le mandat du GDiD, dont l'objectif est et reste l'obtention d'un statut pour les directeurs d'école. Vouloir que le GDiD prenne parti sur d'autres sujets est alors contradictoire.

    RépondreSupprimer
  3. "reste l'obtention d'un statut pour les directeurs d'école. Vouloir que le GDiD prenne parti sur d'autres sujets est alors contradictoire."
    Je ne dis rien d'autre. Mais est-ce vraiment le cas? J'en doute lorsque certains, des "représentants" identifiés, prennent parti sur ces sujets sans aucune nuance.

    RépondreSupprimer
  4. Surprenant qu'un anonyme s'en prenne à des "représentants identifiés" d'un autre site et qui, de plus est, prendraient parti, là-bas, sur des sujets (?) sans aucune nuance(?).

    Dans votre premier commentaire vous dites:
    - NON (majuscule!) aux limites de la liberté d'expression, pas de censure.
    pour, juste après dicter "vos" limites à la liberté d'expression:
    ton "humble" et non péremptoire et rester dans la nuance…
    Qui jugera de la tonalité des camaïeux?
    Je vous propose le plus sincèrement du monde de vous identifier et de devenir un modérateur des forums du GDiD.
    - Chiche?

    P.Lombard (Pierrot)

    RépondreSupprimer